17 et 18 novembre 2016
L’objectif de ce colloque était d’interroger les usages et la production de catégories d’analyse par les jeunes chercheur.e.s en sciences sociales qui effectuent des enquêtes de terrain dans diverses régions du monde.
La notion de « Sud(s) » tout comme la notion d’ « aires culturelles » ont offert la possibilité d’un dialogue transdisciplinaire et ont accompagné le développement de nouvelles théories scientifiques. Ces notions ont aussi joué un rôle décisif dans l’organisation des institutions académiques et dans la mobilité des chercheur.e.s. Cependant, à l’instar de toute catégorisation, elles sont également le fruit de partis pris historiques et épistémologiques. Ainsi, bien que l’opposition des termes « Nord » et « Sud » renvoie à des points cardinaux physiquement neutres, ces derniers ont remplacé des dichotomies antérieures telles qu’Occident/Orient, Occident/Tiers-Monde, pays développés/envoie de développement, pays colonisateurs/colonisés et peuvent comporter un risque d’ethnocentrisme. Des interrogations similaires apparaissent dans le cas des études par « aires culturelles » (Asian studies, Latin American studies, etc). En effet, en établissant une stricte correspondance entre territoires et cultures, la notion « aire culturelle » tend à limiter l’analyse des circulations et des hybridations sociales dans un monde globalisé.
Un tel découpage du paysage de la recherche correspond-il encore à des réalités contemporaines sur nos terrains d’investigation ? Est-il pertinent alors qu’au sein d’un système académique mondialisé, nombre de jeunes chercheur.e.s issu.e.s de pays dits du « Sud » sont affilié.e.s à des laboratoires scientifiques nord-américains et européens (dont ceux de la F3S) ? Ces catégories d’analyse sont-elles opératoires alors que les chercheur.e.s étudient des phénomènes sociaux observés aussi bien au « Nord » qu’au « Sud », avec l’apparition de nouveaux concepts enrichissant de manière transversale les recherches en sciences sociales ? Par ailleurs, est-il possible de se départir des notions définissant des aires culturelles et géographiques pour étudier l’Homme dans sa globalité et sa pluralité ?
LES 17 ET 18 NOVEMBRE 2016 A PARIS
Appel à communications
Le processus scientifique, dans ses essais de remise en cause des normes et des savoirs existants, construit, déconstruit et reconstruit de nouvelles catégories [1]. Il invite aussi à une réflexion linguistique sur le sens des mots et leur valeur sociale [2, 3]. Le poids des traditions scientifiques et institutionnelles, ainsi que les difficultés inhérentes à l’enquête de terrain conduisent souvent les jeunes chercheur.e.s à adopter une démarche de « bricolage » [4]. Le nombre croissant de chercheur.e.s issus des pays dits du « Sud » entraîne également le renouveau des problématiques : leurs regards différents sur les mêmes terrains d’enquête obligent à repenser les catégories d’analyse produites au « Nord ».
Les jeunes chercheur.e.s souhaitant participer à ce colloque sont invité.e.s à mener un retour réflexif sur leurs pratiques de recherche et méthodes d’enquête, en expliquant la façon dont il.le.s s’approprient des catégories d’analyse existantes, les interprètent ou s’en s’inspirent (par exemple en ayant recours à l’interdisciplinarité, au comparatisme, aux « studies » – global studies, urban studies… – ou à des concepts tels que intersectionnalité, transnationalisme, circulations…), voire en proposent de nouvelles.
1. Comment l’usage de certaines catégories d’analyse a-t-il participé à la conception de votre projet de recherche ?
2. Dans quelle mesure leur usage a-t-il conditionné la préparation de votre terrain, la sélection de vos outils et méthodologies d’enquête ?
3. Comment les catégories d’analyse envisagées ont-elles été remises en cause par votre confrontation avec le terrain ?
4. A quel point les données de terrain peuvent-elles parfois subir une « torsion » pour correspondre à des catégories d’analyse et de théorisation ?
Si toutes les thématiques sont les bienvenues, nous porterons toutefois une attention particulière aux travaux qui décriront finement des processus de déconstruction et qui mettront en perspective les difficultés concrètes – scientifiques, professionnelles, politiques, sémantiques, personnelles – qu’elles peuvent induire pour les jeunes chercheur.e.s lorsqu’il.le.s interrogent les limites des catégories d’analyse qu’il.le.s convoquent.